LA
REPARATION DU DOMMAGE.
La
réparation du dommage vise à l’indemnisation des victimes, c’est-à-dire la
compensation des dégâts subis. Cette indemnisation rétablie l’équilibre qui a
été rompue par la survenance d’une perturbation. Donc l’indemnisation a pour
but de remettre les choses en état normale.
Un dommage
subi peut être réparé soit à l’amiable soit par voie judiciaire. Dans le
dernier cas, le juge va essayer d’établit l’existence de la responsabilité,
ensuite il va être amené à mesurer l’étendu de cette responsabilité.
TITRE I :
LE DROIT COMMUN DE REPARATION.
La
réparation du dommage a pour but principal de rétablir un équilibre qui a été
rompu
(victime – responsable). Il s’agit en fait de reconstituer l’état
des choses antérieures au dommage lorsqu’il est possible.
Cette remise des choses en état se fait par le
biais de la réparation en nature, à défaut de celle-ci, on se contentera d’une
réparation par équivalent, c’est-à-dire le versement d’une indemnité à titre de
dommages-intérêts.
CHAPITRE II :
LA REPARATION EN NATURE.
SECTION
1 : DEFINITION.
Une réparation en nature signifie remettre
matériellement les choses en état ou se trouvaient avant le dommage (par exemple : la démolition d’un mur). Cette réparation en nature trouve son
terrain d’élection en matière de trouble de voisinage.
SECTION
2 : DOMAINE D’APPLICATION DE REPARATION EN NATURE.
La réparation peut être convenue par un accord
entre l’auteur du dommage et la victime qui a subit un préjudice. Si aucun
accord n’est réalisé, la question est soumise au juge qui apprécie
souverainement la possibilité et l’opportunité d’une réparation en nature. Par
ailleurs, cette liberté d’appréciation du juge rencontre certaines limites.
PARAGRAPHE 1 : L’EXCLUSION DU PRINCIPE
DE L’APPRECIATION SOUVERAINE DU JUGE PAR L’ARTICLE 261 DU DOC.
Article 261 du DOC : « L’obligation de faire se résout en dommages-intérêts en
cas d’inexécution. Cependant, si l’obligation consiste en un fait dont
l’accomplissement n’exige pas l’action personnelle du débiteur, le créancier
peut-être autorisé à la faire exécuter lui-même aux dépens de ce dernier.
Cette dépense ne peut excéder, toutefois, ce qui est nécessairement pour obtenir l’exécution de l’obligation : lorsqu’elle dépasse la somme de cent francs (100 francs), le créancier doit se faire autoriser par le juge compétent ».
Cette dépense ne peut excéder, toutefois, ce qui est nécessairement pour obtenir l’exécution de l’obligation : lorsqu’elle dépasse la somme de cent francs (100 francs), le créancier doit se faire autoriser par le juge compétent ».
Cette disposition de l’article 261 du DOC, édicte que l’obligation de faire ou de ne pas
faire se résout en Dommages-intérêts en cas d’inexécution. Ce texte semble
imposer la réparation en Dommages-Intérêts dans une grande majorité de cas. En
effet, la plupart des obligations entrent dans cette catégorie. Selon la
doctrine classique française cette disposition a pour but de respecter les
libertés individuelles et le juge civil n’a pas le pouvoir d’imposer
directement aux particuliers un acte ou une abstention. Le seul moyen de
pression consisterait à condamner le responsable à des dommages-intérêts {nul ne peut être contraint d’exécuter un
acte} à l’obligation de faire ou de ne pas faire rentre
dans la sphère de la vie privée, et le juge n’a pas le droit d’imposer à une
personne de faire ou de ne pas faire.
Cette conception a été l’objet de critique,
puisqu’on a reproché de donner le choix au débiteur de son obligation.
Seulement il y a certaines limites, la réparation en dommage-intérêts ne doit
être imposée que dans le cas où : « une
contrainte directe ou indirecte à l’exécution par nature se heurtait à une
impossibilité morale ou matérielle ».
La réparation pécuniaire ne concernait que des obligations personnelles. Cette
interprétation semble en harmonie avec l’article
261, al 2 du DOC.
Exemples :
-
La participation personnelle du
débiteur : la réparation dans ce cas ne se ferait pas par nature mais par
le biais de dommages-intérêts.
-
La responsabilité résultante du refus d’un
artiste ou d’un auteur d’exécuter une œuvre de l’esprit, ou encore un
professeur de donner un cours. Il s’agit de tous les contrats relatifs à
l’esprit et aux activités artistiques. Ils sont considérés comme des obligations
personnelles. (Un arrêt de la Cour de
Cassation a refusé de contraindre un peintre de peindre un tableau qu’on lui a
commandé. Idem pour un comédien qui a refusé de faire son spectacle à la
dernière minute).
PARAGRAPHE
2 : LA REPARATION EN NATURE IMPOSSIBLE.
Cette
impossibilité peut-être soit matérielle soit juridique.
Impossibilité
matérielle :
Celle-ci tient parfois de la nature du
dommage. Il en est ainsi par exemple, en matière de dommage temporel, on ne
pourrait pas réparer la perte d’un organe humain (l’ablation du rein du responsable). De même, lorsque le préjudice
consiste en la perte d’un corps certain qui devait être livré.
Impossibilité
juridique :
Elle résulterait du respecte des prérogatives
des puissances publiques (par
exemple : le juge civil ne peut pas ordonner la fermeture d’un
établissement dont l’exploitation a causé un trouble aux tiers, si cet
établissement a été autorisé par l’administration en vertu du principe de
séparation des pouvoirs).
SECTION 3 :
LES DIVERSES FORMES DE REPARATION PECUNIAIRE.
Toute forme de réparation autre que pécuniaire
peut-être considérée comme une réparation en nature. Il existe divers procédés.
Premièrement, on peut parler de la reconstitution de l’état des choses
antérieures au dommage. Deuxièmement, affirmation publique des droits de la
victime de certains dommages, et des mesures tendant à faire cesser le dommage.
PARAGRAPHE 1 : LA RECONSTITUTION DE
L’ETAT DES CHOSES ANTERIEURES AU DOMMAGE.
Il peut s’agit de la reconstitution d’une
situation matérielle ou juridique.
La reconstitution de situation matérielle est
possible en cas d’un dommage causé à un
bien matériel par la restauration ou le remplacement de l’objet détruit.
La reconstitution de la situation juridique
antérieure au dommage est également considérée comme une forme de réparation en
nature utilisée par les tribunaux, notamment lorsque le dommage résulte de
l’annulation ou de la mauvaise exécution d’un contrat.
Exemples :
-
En matière
de la promesse unilatérale de vente ou synallagmatique, lorsque le promettant
refuse de signer l’acte de vente. L’affaire a été devant les tribunaux et le
tribunal a imposé une réparation en nature et non pas des dommages-intérêts.
-
Concurrence
déloyale : le juge peut mettre fin à cette activité qui nuit à l’auteur.
La victime demande au tribunal la cessation des agissements nuisibles de
l’auteur du dommage.
-
Trouble de
voisinage : dans ce domaine le tribunal va soit réduire, soit cesser ou
supprimer les nuisances quelle qu’elle soit (par exemple : interdiction
sous astreinte d’un laboratoire de pâtisserie qui empêche les voisins de
dormir).
-
Suppression
des passages qui ont été plagiés.
-
Atteinte à
la réputation ou à l’honneur (par exemple : publication qui touche à
l’honneur d’une personne).
-
Atteinte à
la vie privée : En France, la loi du 17 juillet 1970 tendant à renforcer
la garantie des droits individuels des citoyens a introduit dans le code civil
une disposition selon laquelle « chacun a droit au respect de sa vie
privée », et qui donne aux juges les moyens de faire cesser, la cas
échéant en urgence, toute atteinte à la vie privée.
Cependant,
la réparation d’un dommage causé à autrui est souvent lié à l’appréciation du
juge qui lui seul a les prérogatives d’évaluer l’étendue du dommage, et ainsi
octroyer des Dommages-Intérêts à la victime.
CHAPITRE
II : LA REPARATION PECUNIAIRE.
Lorsque le préjudice invoqué par le
demandeur est jugé réparable, le tribunal doit procéder à l’évaluation des
Dommages-Intérêts. Cette évaluation doit selon une jurisprudence constante être
réalisée au jour du jugement définitif, et non pas à la date de sa réalisation.
Cette solution présente des avantages
pour la victime qui ne subit pas les effets de la dépréciation monétaire (on prend en considération le montant le jour
du jugement). Néanmoins, la réparation des préjudices est soumise à deux
règles importantes :
-
Le principe
de la réparation intégrale du préjudice {Section
1}.
-
La
reconnaissance d’un pouvoir souverain au juge du fond {Section
2}.
SECTION
1 : LE PRINCIPE DE LA REPARATION INTEGRALE DU PREJUDICE.
« On
répare tout le préjudice, mais rien que le préjudice ». Cette citation illustre à la
perfection le principe appliqué en droit de la responsabilité civile qui est
celui de la réparation intégrale du préjudice. Ce droit a été rappelé par la Cour de Cassation dans un arrêt du 19 juin 2003 où la Haute Cour
affirme : « que l’auteur
d’un accident doit en réparer toutes les conséquences dommageables ».
Ce principe découle implicitement de l’article
1382 du Code Civil français, en ce sens qu’il impose la réparation de tout
préjudice subi. C’est donc par l’avènement du Code Civil français en 1804 que
nait un principe général de responsabilité pour faite distinct de toute notion
punitive ou de sanction, visant à effacer tout préjudice subi par la victime.
L’acte de naissance de cette réparation intervient par un arrêt du 28 octobre 1954 où la Cour
de Cassation affirme : « le
propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que
possible l’équilibre détruit par le dommage et de remplacer la victime dans la
situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas
produit ».
Ce
principe signifie une équivalence parfaite entre le dommage subi et le montant
des dommages et intérêts alloués. Normalement, doit être réparé tout le
préjudice, mais rien que le préjudice. Ainsi, le juge doit veiller à la
réparation intégrale du préjudice.
Le
paiement de l’indemnité est destiné à compenser les dommages subis par la
victime. Il existe deux moyens de compensation :
-
Allocation
de capital.
-
Versement
d’une somme d’argent périodique.
Comment
calcule-t-on cette indemnité ?
L’indemnité doit être calculée en
fonction de la valeur du dommage. De plus, si on prend en considération le
critère subjectif, l’indemnité sera différente.
En effet, la gravité de la faute n’a
pas d’influences sur le montant de l’indemnité. En revanche, plusieurs
dispositions du DOC en droit marocain prévoient la responsabilité en présence
d’une faute revêtant une certaine gravité. Par exemple, l’article 232 du DOC retient le critère de gravité de la faute comme
fondement d’une responsabilité à laquelle on ne peut échapper. En effet, la
faute lourde ou la faute dolosive rend inefficace les clauses de
non-responsabilité, donc le système de gradation des fautes découle des
dispositions du DOC. Il appartient au tribunal d’évaluer différemment les
Dommages-Intérêts selon qu’il s’agisse de la faute du débiteur ou de son dol.
On constate donc que la gravité de la faute en droit marocain peut avoir une
influence sur le montant de la réparation. Cette règle semble heurter le
principe de la réparation intégrale du préjudice.
La règle posée par l’article 264 du DOC s’analyse en une
aggravation de la responsabilité en présence d’une faute intentionnelle.
Article 232 du DOC. - : « On ne peut stipuler d’avance qu’on ne sera pas
tenu de sa faute lourde ou de son dol ».
Article 264 du DOC.- : « Les
dommages sont la perte effective que le créancier a éprouvée et le gain dont il
a été privé, et qui sont la conséquence directe de l’inexécution de
l’obligation. L’appréciation des circonstances spéciales de chaque espèce est
remise à la prudence du tribunal : il doit évaluer différemment la mesure
des dommages-intérêts, selon qu’il s’agit de la faute du débiteur ou de son
dol.
[Les
parties contractantes peuvent convenir de dommages-intérêts dus au titre du
préjudice que subirait le créancier en raison de l’inexécution totale ou
partielle de l’obligation initiale ou en raison du retard apporté à son
exécution.
Le
tribunal peut réduire le montant des dommages-intérêts convenu s’il est
excessif ou augmenter sa valeur s’il est minoré comme il peut réduire le
montant des dommages-intérêts convenu compte tenu du profit que le créancier en
aurait retiré du fait de l’exécution partielle de l’obligation.
Toute
clause contraire est réputée nulle.] ».
PARAGRAPHE 1 : LA MISE EN ŒUVRE
DU PRINCIPE DE LA REPARATION INTEGRALE.
L’application
de ce principe doit être appliquée in concreto.
a) Les
dommages matériels :
L’évaluation des dommages matériels
est facile en principe. Néanmoins, des difficultés d’application se sont
présentées en matière de détérioration d’un bien usagé. Le problème s’est posé
de savoir si l’indemnité devrait se calculer sur la base du coût de réparation
ou en fonction de la valeur de remplacement. La jurisprudence est hésitante
lorsque par exemple, la valeur de remise en état dépasse la valeur de
remplacement. La victime doit accepter le remplacement de la chose. Impossible
de réparer la chose puisque le coût de remplacement excède la valeur de la
chose.
b) Le dommage
corporel :
Ce dommage soulève des problèmes. Par
exemple, quand il s’agit de l’incapacité temporaire de travail ou
démobilisation de la victime, l’évaluation doit être basée sur les preuves
rapportée par le salarié. Si on est devant l’évaluation de l’incapacité
permanente, il faut déterminer le taux de cette invalidité.
En général, l’évaluation doit se faire
soit en cas d’incapacité temporaire ou permanente. Par conséquent, la juge doit
recourir à l’expertise pour pouvoir évaluer le montant.
c) Les
dommages extrapatrimoniaux :
La mise en œuvre de cette réparation
peut poser des problèmes en matière des dommages extrapatrimoniaux, puisque ce
préjudice ne peut être évalué de manière précise par le juge. Il est en effet
difficile de « doser » les souffrances ou les « impressions
psychologiques ». En effet, les sentiments éprouvés lors d’un événement
donné varient d’une personne à l’autre et ne peuvent être réellement évaluées.
Dans ces hypothèses les Dommages-Intérêts jouent un rôle plutôt satisfacteur
que compensateur.
PARAGRAPHE 2 : LA REVISION DE
L’INDEMNISATION.
Après
la transaction ou la décision judiciaire, est-ce que la victime peut demander
une révision de l’indemnité ?
La révision de l’indemnité peut être
motivée par la modification des éléments intrinsèques du dommage. Après la
transaction ou la décision judiciaire, il se peut que le dommage vienne à se
modifier soit dans le sens d’une diminution soit dans celui d’une aggravation.
C’est surtout le cas des accidents corporels ayant entrainés une incapacité
permanente. Lorsqu’il y a amélioration de l’état de la victime, aucune révision
n’est admise dans le sens d’une diminution des droits de la victime. En
revanche, en cas d’aggravation de l’état de la victime, les tribunaux se
montrent favorables à la révision. En effet, la jurisprudence considère les aggravations
comme des dommages nouveaux susceptibles de justifier l’allocation d’une
indemnité supplémentaire.
SECTION
2 : L’EVALUATION DU PREJUDICE RELEVE DE L’APPRECIATION SOUVERAINE DU
JUGE DE FOND.
L’évaluation du préjudice étant une
question de fait, elle relève du pouvoir souverain du juge. Ces derniers
disposent d’une grande liberté d’appréciation pour fixer le montant de
l’indemnité mais la Cour de Cassation se réserve un certain contrôle (censure de la Cour de Cassation). Les
juges ont une large part d’appréciation, et ils n’ont pas à justifier les
moyens d’appréciation puisqu’il n’y a pas un barème pour évaluer un préjudice.
-
Non-justification
des moyens d’appréciation.
-
Non-justification
des éléments sur lesquels ils ont alloués l’indemnité.
Le juge doit évaluer globalement le
préjudice et fixer le montant et il n’a pas à justifier les moyens de cette
fixation.
Cette liberté peut se heurter au
contrôle de la Cour de Cassation. La Cour de Cassation va voir si le juge s’est
référé au principe intégral du préjudice. Si le juge à évalué d’une manière in concreto le préjudice.
La Cour de Cassation exige que le juge
se fonde sur les critères subjectifs. Beaucoup d’auteurs pensent que le
contrôle de la Cour de Cassation est faible et que cette dernière doit être
sévère et montrer une rigueur vis-à-vis du juge.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire