Le droit de la nationalité
Le national
marocain, c’est la personne qui a la nationalité marocaine, soit que cette
nationalité lui a été attribuée dès la naissance, soit qu’elle l’ait acquise en
cours d’existence (Chapitre II). Il convient aussi que la personne concernée
n’ait pas perdu la nationalité (Chapitre III). Finalement, il faudra
s’intéresser aux règles et conditions de forme quant à la preuve et au
contentieux de la nationalité (Chapitre IV).
Chapitre I : Notions
générales sur le droit de la nationalité
Le droit de la nationalité
regroupe l’ensemble des règles déterminant les sujets d’un Etat. En droit
public, il est connu que les éléments constitutifs de l’Etat sont son
territoire, son gouvernement à côté de sa population se composant de l’ensemble
des nationaux.
Paul LAGARDE définit la
nationalité comme étant « l’appartenance juridique et politique constitutive
d’un Etat »[1].
L’on étudiera successivement
l’identification de la nationalité (Section I), les sources du droit de la
nationalité (Section II) pour s’intéresser finalement aux conflits de
nationalités (Section III).
Section I : le droit de la nationalité
L’on étudiera successivement
l’approche sociologique de la nationalité à travers la nationalité de fait
(Sous-section I) puis la nationalité de droit (Sous-section II).
Sous-section I : Nationalité de fait
La nationalité est définie
selon une approche sociologique comme étant un sentiment d’appartenance à une
nation, à une communauté d’individus ressenti par un individu par exemple en
raison d’une histoire, d’une culture ou d’une langue commune[2]. Elle constitue une
réalité psychologique: « une nationalité est une mentalité »[3].
L’approche la plus célèbre de
la nationalité de fait a été donnée par l’italien Mancini la définissant comme
« une société naturelle d’Hommes partageant un ensemble d’éléments, unité de
territoire, d’origine, de mœurs, de langue, et évoluant dans le cadre d’une
communauté sociale. Aussi est-elle cette mentalité, ce sentiment national qui
fait d’un groupe humain se dit, ou même se sente, uni et solidaire pour ne
former qu’une seule entité ».
Sous-section II : Nationalité de droit
La nationalité de droit
constituant l’objet de notre étude peut être définie comme étant un lien de
droit rattachant un individu à un Etat.
Section II : Sources du droit de la nationalité
Il convient de rappeler les
différentes sources du droit de la nationalité qu’a connu le Maroc dans le
temps (Sous-section I), les conventions internationales (Sous-section II) ainsi que les lois internes
(Sous-section III).
Sous-section I : Historique
L’on étudiera successivement les
sources du droit de la nationalité dans la période de l’avant protectorat (B)
ainsi que pendant le protectorat (B).
A- Avant le
protectorat
La
conférence de Madrid du 3 juillet 1880 a donné lieu aux accords signés entre le Maroc et les pays
européens afin de renforcer les avantages liés à l'évolution de ces derniers
sur le sol marocain et donner un caractère juridique et réglementaire à cette
progression. En matière de droit de la nationalité, la conférence de Madrid a
précisé dans son article 15 de que « Tout sujet marocain naturalisé à
l’étranger, qui reviendra au Maroc, devra, après un temps de séjour égal à
celui qui aura été régulièrement nécessaire pour obtenir la naturalisation,
opter entre sa soumission entière aux lois de l’Empire ou l’obligation de
quitter le Maroc, à moins qu’il ne soit constaté que la naturalisation
étrangère a été obtenue avec l’assentiment du Gouvernement marocain.
La naturalisation étrangère acquise jusqu’à
ce jour par des sujets marocains, suivant les règles établies par les lois de
chaque pays, leur est maintenue pour tous ses effets, sans restriction aucune ». Toutefois, le texte ne s’est nullement
intéressé à l’acquisition de la nationalité.
B-
Pendant le protectorat
Pendant la période du protectorat, le Maroc avait conservé sa
souveraineté par rapport aux Etats du protectorat français et espagnol. Les
sources du droit de la nationalité pendant le protectorat sont deux textes:
·
Source internationale : Convention de Madrid du 3/07/1880
·
Source interne:
Dahir du 8 novembre 1921 relatif à la nationalité marocaine précisant que « est
marocain, à l’exception des citoyens sujets ou ressortissants de la puissance
protectrice autres que nos sujets, tout individu né dans la zone française de
notre empire de parents étrangers dont l’un y est lui-même né ».
Sous-section II : Conventions internationales
Notons que
l’article 1er du code de la nationalité consacre le principe
constitutionnellement reconnu de la primauté des conventions internationales
sur le droit interne. Dans son deuxième alinéa, cet article précise que « …..
Les dispositions des traités ou accords internationaux ratifiés et publiés prévalent sur celles de la loi interne».
Les dispositions des traités ou accords internationaux ratifiés et publiés prévalent sur celles de la loi interne».
Sous-section III :
Coutume et jurisprudence
Les Etats peuvent déterminer
quels sont leurs nationaux. Ce principe d’origine coutumière a consacré à
plusieurs reprises par les juridictions internationales spécialement par la
Cour internationale de justice dans l’arrêt Nottebohm du 6 avril 1955
déclarant que « la nationalité est un lien juridique ayant à sa base un fait
social de rattachement, une solidarité effective d’existence, d’intérêts, de
base un fait social de rattachement, une solidarité effective d’existence,
d’intérêts, de sentiments joints à une réciprocité de droits et de devoirs.
Elle est, peut-on dire, l’expression juridique du fait que l’individu auquel
est conférée, soit directement par la loi, soit par un acte de l’autorité, est,
en fait, plus étroitement attaché à la population de l’Etat qui la lui confère
qu’à celle de tout autre Etat »[4].
Sous-section IV : Lois
Le droit de la nationalité au
Maroc est régi par le Dahir du 6 septembre 1958 portant code de la nationalité
marocaine. Il est à noter que la loi n° 62-06 du 3 rabii I 1428 (23 mars 2007)
a instauré une réforme importante en matière de droit de la nationalité
permettant à l’enfant né d’une mère marocaine de se faire attribuer la
nationalité marocaine.
Section III : Conflit de nationalités
L’on est en présence de deux
situations dans le c adre du
conflit de nationalités, il s’agit du cumul de nationalité c’est le conflit
positif (Sous-section I) puis l’absence de nationalité ou l’apatridie c’est le
conflit négatif (Sous-section II).
Sous-section I : Conflit positif : Cumul
de nationalités
Dans ce cas, l’individu est le
national de deux ou plusieurs Etats.
L’enfant dont le père a la
nationalité d’un pays X et la mère d’un pays Y, si l’on admet l’équivalence de
la maternité et de la paternité, il est normal que chacun des parents lui offre
sa nationalité.
Dans ce contexte, l’on parle
d’une situation de binationalité. Certains Etats attribuent la nationalité à
raison de la filiation (Jus sanguinis) et d’autre à raison du lieu de
naissance (jus soli).
Les femmes mariées conservant
leurs propres nationalités, elles ont par voie de conséquence une double
nationalité et les enfants du couple se trouvent dans cette situation de cumul
de nationalités.
Lorsqu’un
individu possède la nationalité de deux ou plusieurs Etats, l’article 3 de la
convention de La Haye concernant précise que « …un individu possédant deux
ou plusieurs nationalités pourra être considéré par chacun des Etats dont il a
la nationalité comme ressortissant »[5].
·
Cumul de nationalités: le for marocain
Le juge marocain doit faire prévaloir la nationalité marocaine
sur les autres nationalités. Ainsi, quand il est en présence d’une preuve de la
nationalité marocaine, il doit la prendre en considération en excluant toutes
les nationalités de l’individu.
•
Pendant le protectorat français au Maroc
Quand l’individu est considéré ayant la nationalité marocaine
au regard de la législation, le juge prend en considération que la nationalité
marocaine. Cette période a connu l’existence d’une exception. Il s’agit du conflit
entre nationalité marocaine et française, l’on fait prévaloir la nationalité
française. Le droit de l’Etat protecteur prévaut sur celui de l’Etat protégé.
·
Cumul de nationalités: quand le for est un tribunal n’ayant
aucun rapport avec les parties
L’article 5 de la Convention de la Haye de 1930 précise que « Dans
un Etat tiers, l’individu possédant plusieurs nationalités devra être traité
comme s’il n’en avait qu’une. Sans préjudice des règles de droit appliquées
dans l’Etat tiers en matière de statut personnel et sous réserve des
conventions en vigueur, cet Etat pourra, sur son territoire, reconnaître
exclusivement, parmi les nationalités que possède un tel individu, soit la
nationalité du pays dans lequel il a sa résidence habituelle et principale,
soit la nationalité de celui auquel, d’après les circonstances, il apparaît
comme se rattachant le plus en fait ». Il est à noter que le même Principe
est adopté par le Maroc malgré l’absence d’une base légale régissant la
question.
Sous-section II : Conflit négatif :
Apatridie
La Convention de New York du 28
septembre 1954 a amélioré le sort des apatrides qui sont parfois des réfugiés
politiques. Elle les définit comme étant « toute personne qu'aucun État
ne considère comme son ressortissant par application de sa législation ».
Un apatride est une personne
dépourvue de nationalité, qui ne bénéficie de la protection d'aucun État. Il
est à préciser que le Haut Commissariat des Nations unies pour les
réfugiés (HCR): Organisme se chargeant des apatrides.
·
Inconvénients de l’apatridie :
L’apatride peut être expulsé de
partout; il n’a aucune protection diplomatique et ne peut obtenir de passeport.
Chapitre II : Etre
marocain
Section I : Attribution
de la nationalité marocaine
Les fondements de l’attribution
de la nationalité d’origine selon les pays sont au nom:
- la filiation (système dit jus
sanguinis, ou droit du sang).
- le lieu de naissance (système
dit du jus soli, ou droit du sol).
Dans ce contexte, l’on étudiera
successivement l’attribution de la nationalité à raison de la filiation
(Sous-section I) puis l’attribution de la nationalité à raison de la naissance
au Maroc (Sous-section II).
Sous-section
I : Attribution de la nationalité à raison de la filiation
L’article 6 du code de la nationalité
énonce les modes d’attribution de la nationalité à raison de la filiation en
précisant que « Est Marocain, l’enfant né d’un père marocain ou d’une mère
marocaine ».
La nationalité attribuée selon le jus sanguinis repose sur
le lien de filiation qui existe entre l’intéressé au moment de sa naissance et
celui qui va lui transmettre sa nationalité. Ainsi, le cas fréquent de cette
attribution est de l’enfant né d’un père marocain dans le cadre de filiation
légitime et sans prendre en considération le mode de son acquisition, la
nationalité marocaine du père doit exister à la naissance de l’enfant. Notons
que la religion n’a aucun effet.
Il est à préciser que dans la
législation marocaine, l’on attribue la nationalité à l’enfant né d’une mère
marocaine et d’un père inconnu sur la base de l’article 6 ci-dessus. Cette règle
instaurée permet d’éviter le cas d’apatride. Elle s’applique également en cas
de sa naissance à l’étranger.
Sous-section
II : Attribution de la nationalité à raison de la naissance au Maroc
Il est à noter que
l’attribution de la nationalité à raison de la naissance au Maroc est organisée
par l’article 7 du code la nationalité. Ce système dit du jus soli,
ou droit du sol attribue la nationalité marocaine à l’enfant né au Maroc de
parents inconnus aux termes de l’article du même code. L’article
ajoute que « Toutefois, l'enfant né au Maroc de parents
inconnus sera réputé n'avoir jamais été Marocain si, au cours de sa minorité,
sa filiation est établie à l'égard d'un étranger, et s'il a, conformément à la
loi nationale de cet étranger, la nationalité de celui-ci. L’enfant de parents
inconnus trouvé au Maroc est présumé, jusqu'à preuve du contraire, né au Maroc
».
Dans un autre niveau, il est
important de mettre l’accent sur le cas de l’enfant né au Maroc d’une mère
marocaine et d’un père apatride. Ainsi, la disposition se base sur une
combinaison entre jus sanguinis et jus soli. Elle exige la
naissance au Maroc, à la différence du cas de l’enfant né d’une mère marocaine
et d’un père inconnu. Si l’enfant est né à l’étranger, il n’aura pas la
nationalité marocaine. Le père doit être connu pour avoir la nationalité selon
le jus sanguinis.
Section II :
Acquisition de la nationalité marocaine
Au cours de son existence, un
individu peut acquérir la nationalité marocaine –Naturalisation- selon trois
modes. Il s’agit de son acquisition par le bienfait de la loi (Sous-section I),
par la Kafala (Sous-section II) et finalement l’acquérir par le mariage
(Sous-section III).
Sous-section I : Acquisition
par le bienfait de la loi
L’article 9 du code de la
nationalité dispose dans alinéa premier quant à l’acquisition de la nationalité
marocaine par la naissance et la résidence au Maroc que « acquiert la
nationalité marocaine si, dans les deux ans précédant sa majorité, il déclare
vouloir acquérir cette nationalité, tout enfant né au Maroc de parents
étrangers qui y sont eux-mêmes nés postérieurement à la mise en vigueur du
présent dahir, à condition d’avoir une résidence habituelle et régulière au Maroc »
sauf cas d’irrecevabilité, rejet et opposition de la
par du ministère de la justice
Le même article 9 ajoute que
« Sauf opposition du ministre de la justice conformément aux articles
26 et 27, acquiert la nationalité marocaine, si elle déclare opter pour
celle-ci, toute personne née au Maroc de parents étrangers et ayant une
résidence habituelle et régulière au Maroc, dont le père lui-même est né au
Maroc, lorsque ce dernier se rattache à un pays dont la fraction majoritaire de
la population est constituée par une communauté ayant pour langue l’arabe ou
pour religion l’Islam et appartenant à cette communauté».
Sous-section II :
Acquisition par la Kafala (prise en charge)
L’article 9, al. 2 du code la
nationalité dispose que « Sauf opposition du ministre de la justice
conformément aux articles 26 et 27 du présent code, toute personne de
nationalité marocaine ayant pendant plus de cinq années, la kafala (la prise en
charge) d’un enfant né en dehors du Maroc de parents inconnus, peut présenter
une déclaration aux fins d’acquisition de la nationalité marocaine par
l’enfant.
Sauf opposition du ministre
de la justice conformément auxdits articles, l’enfant soumis à la Kafala,
répondant aux conditions ci-dessus et dont le Kafil n’a pas présenté de déclaration
après la fin des cinq années, peut présenter personnellement sa déclaration aux
fins d’acquisition de la nationalité marocaine durant les deux années précédant
sa majorité».
Sous-section III :
Acquisition par le mariage
L’article 10 du code de la
nationalité dispose que « La femme étrangère ayant épousé un Marocain
peut demander la nationalité au ministre de la justice à condition d’avoir ne résidence habituelle
et régulière au Maroc du ménage depuis cinq ans au moins pendant la relation
conjugale.
La fin de la relation
conjugale n’a aucun effet sur la déclaration qu’elle a déposée avant ladite
fin.
Le ministre de la justice
statue sur la déclaration dans un délai d’un an à compter de la date de son
dépôt. Le fait de ne pas statuer dans ledit délai vaut opposition».
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