LE VOL
Le vol constitue l'infraction la plus connue et la plus
fréquente. Cette infraction présente une importance sociale considérable dans
la mesure où le voleur porte directement atteinte au droit de propriété. Le
code pénal marocain définit quant à lui l'infraction du vol dans son article
505 qui stipule que « quiconque soustrait frauduleusement une chose appartenant
à autrui est coupable de vol... »
Section I : les caractères juridiques du vol
Paragraphe
1 : Le vol est un délit public
Le principe est que la poursuite peut être déclenchée
indépendamment de toute plainte de la victime. Cela entraîne deux choses :
l'abstention de la victime n'empêche pas le ministère public de la poursuite.
Deuxième conséquence la volonté de la victime d'exclure l'action publique n'a
aucun effet et le ministère public a le droit de poursuivre.
Ce principe connaît une limite qui se dégage de l'article
522 qui précise « la poursuite n'a lieu que sur plainte de la personne lésée,
le retrait de la plainte met fin aux poursuite... »
Paragraphe
2 : Le vol est un délit instantané
Cela suppose que l'on considère que tous les éléments de
l'infraction doivent être réunis au moment de la soustraction. En pratique, le
délit peut d'accomplir pendant un temps plus au moins long mais en droit cela
n'a aucune importance, ce n'est pas parce que le comportement délictueux
s'effectue en un certain temps que le rôle peut être considéré comme étant une
infraction continue. En effet, quelque soit la durée pendant laquelle la valeur
conserve la chose, quelque soit le temps qu'il met à effectuer la soustraction
de la chose. Mais, le vol reste une infraction instantanée, le caractère
instantané du délit implique deux conséquence : du point de vue des éléments de
l'infraction :
Le délit est constitué dès l'instant de la soustraction ceci
veut dire que le comportement du délinquant après la soustraction n'a plus
aucune importance et notamment le repentir du délinquant qui le mènerait à
restituer la chose, n'empêche pas que le délit existe.
Deuxième conséquence, ce que l'intention frauduleuse qui est
l'un des éléments du délit doit être à moment même de la soustraction, en
conséquence une intention frauduleuse qui paraîtrait postérieurement à la
soustraction ne suffirait par exemple l'erreur.
Le caractère instantané de l'infraction fait ressortir 3
conséquences du point de vue de la procédure
La compétence du tribunal : Seul le
tribunal du lieu de la soustraction est compétent en effet du lieu ou il s'est
trouvé en possession de l'objet.
La prescription : La prescription court dès la soustraction.
C'est une conséquence logique du caractère instantané du vol et là encore, la
question a été discutée pour des raisons pratiques. C'est l'existence de nos
jours du vol de l'électricité et du vol d'énergie. Ces soustractions sont
prévues et sanctionnées par l'article 521 du code pénal. Une partie de la
doctrine estimait que l'infraction du vol d'électricité ou d'énergie se
prolongeait aussi longtemps que duraient les prélèvements en réalité. Le délit
est instantané car dans une telle hypothèse il ya du vol successif et nous
somme dans une situation « du concours réel de l'infraction ». La prescription
cours à chaque soustraction.
L'autorité de la chose jugée : L'autorité de la chose jugée
s'applique quelque soit le comportement extérieur de la victime. Ce principe
entraîne deux conséquences : 1. Ce que le juge a décidé est considéré comme
étant ia vérité aux enjeux du droit. 2. On ne peut pas juger une deuxième fois
une affaire ayant fait l'affaire d'une décision définitive. C'est une règle
qu'on a l'habitude d'appliquer lorsque le juge a condamné pourvoi et lorsque
l'individu a exécuté sa peine, il ne peut pas a nouveau être poursuivi. Si elle
s'est retrouvée en possession de l'objet dérobé (l'action en revendication).
Il existe cependant une exception considérable propre au
droit marocain qui est prévue par l'article 529 du code pénal.
Paragraphe
3 : Le vol est une infraction autonome
Ca veut dire que le vol se distingue des autres infractions
contre les biens ce qui distingue le vol des autres infractions plus au moins
voisines est la notion de soustraction.
Section II : Les éléments constitutifs du vol
L'article 505 du code pénal définit le vol dans les termes
suivants : « quiconque soustrait frauduleusement une chose appartenant à autrui
est coupable de vol » cette définition comporte deux aspects matériel et moral
Paragraphe
1 : L’élément matériel
Le texte de l'article 505 précise que l'objet de l'acte est
une chose appartenant à autrui.
C'est la soustraction qui représente l'élément central de
l'infraction. Cependant, deux questions se posent, à savoir sur quoi doit
porter la soustraction ? (c'est l'objet de l'acte). En quoi consiste la
soustraction ? (c'est la nature de l'acte).
a. la chose
Le code pénal a préféré se servir du simple mot « chose »
qui n'est pas associé à aucun qualificatif tel que les mots « matérielle » ou «
corporelle » qui réduirait la portée aux seules choses physiques et tangibles.
Le texte vise tout bien ou tout élément patrimonial envisagé
indépendamment de ses qualités physiques ou matérielles. Autrement dit, il
résulte de la définition du vol que celui-ci ne peut avoir pour objet une chose
susceptible d'être soustraite et d'être appropriée.
1. Possibilité de soustraction de la chose
Les choses qui sont ordinairement objets de soustraction
frauduleuse sont les biens matériels ou corporels dont lesquels s'incarne le
plus souvent la propriété. L'argent, les bijoux ou les meuble sont des exemples
classiques des biens matériels que convoitent et dérobent journellement les
voleurs. Autrement dit, il s'agit de toutes les choses qui peuvent être volées
dans l'esprit de la loi, toutes les choses corporelles c'est-à-dire mobilières.
La valeur marchande ne joue aucun rôle. C'est ainsi que les tribunaux ont admis
le vol de la chose qui n'avait aucune valeur marchande, par exemple le vol des
copies d'examen ou d'une lettre d'amour».
Le caractère matériel et la nature mobilière de la chose
protégée excluent du domaine du vol aussi bien les droits ou les biens
incorporels que les immeubles.
En ce qui concerne les droits incorporels, comme les droits
de créance, ils ne peuvent donner lieu à enlèvement. On ne peut soustraire
directement un droit de créance ou de propriété littéraire, artistique ou
industrielle. Mais ces droits comportent un support matériel, et il y a vol à
soustraire un manuscrit, un plan, un titre ou un document constatant le droit
et permettant d'en obtenir le paiement.
Pour ce qui est des immeubles, il a toujours été admis que
le vol ne concernait que les meubles à l'exception des immeubles. Cela suppose
en effet qu'on puisse enlever la chose, la transporter d'un lieu à un autre.
Les immeubles ne sont pas protégés contre le vol et cela se justifie d'une part
par leur fixité physique et d'autre part par le fait que le propriétaire de
l'immeuble est efficacement protégé par les règles civiles et les règles de
droit foncier. Toutefois, la loi pénale intervient dans deux cas :
Une première hypothèse qui résulte du fait qu'en matière
d'immeuble, la distinction pénale ne coïncide pas avec la distinction civile.
Or du moment que l'article 505 précise que toute chose peut être volée quelque
soit sa condition juridique du moment que sa nature physique permet de la
déplacer effectivement, on peut donc voler les immeubles par destination
(exemple: vol d'un mobilier d'hôtel, vol d'un matériel agricole).
On écarte ici la fiction juridique de leur immobilisation
pour ne tenir compte que de leur nature physique de meuble. De même, on peut
soustraire des immeubles par nature que l'on a pu mobiliser (exemple : les
tuiles d'un toit)
Deuxième hypothèse : il s'agit des exceptions prévues par
des textes particuliers. En effet, la loi pénale prévoit certaines atteintes à
la propriété immobilière qui constitue une infraction spéciale. Les articles
520 et 606 du code pénal sanctionnent le fait d'usurper une partie de la
propriété d'autrui (exemple le fait de déplacer les bornes).
2. Possibilité d'appropriation
Dès que la chose est susceptible d'appropriation et peu
importe l'état et la forme sous lesquels elle se présente, mis à part le vol de
l'eau à usage agricole dont la sanction a été prévue par le Dahir de 1926, la
jurisprudence réprime quant à elle le vol d'eau à usage industriel ou domestique.
Ces vols supposent une modification de l'appareil distributeur permettant à
l'usager de recevoir une quantité d'eau supérieure à celle qu'indique le
compteur.
En ce qui concerne le vol d'énergie, l'article 521 du code
pénal incrimine toute personne qui soustrait frauduleusement de l'énergie
électrique ou toute autre énergie ayant une valeur économique.
Une troisième possibilité soulève un problème concernant les
usages et les services. Le problème est le suivant, y a-t-ii vol lorsqu'on ne
soustrait pas la propriété mais on se contente d'utiliser la chose contre la
volonté de son propriétaire sans intention de se t'approprier. C'est le
problème du vol d'usage.
En droit marocain, le vol d'usage n'était pas sanctionné et
le vol de service ne l'était qu'avec réticence. C'est ainsi que le vol d'usage,
c'est-à-dire la soustraction d'une chose appartenant à autrui simplement pour
s'en servir à ['insu ou contre le grès de son propriétaire ne constituait pas
un vol. De même, l'abus de service, c'est-à-dire le fait de voyager sans billet
n'était pas non plus considéré comme un vol. Cependant, un tel comportement
faisait l'objet d'incrimination légère.
Aujourd'hui, l'article 522 sanctionne toute personne qui
fait usage d'un véhicule motorisé à l'insu ou contre la volonté de son
propriétaire. Cependant, son application est limitée par deux conditions : Il
faut une plainte de la victime et le retrait de la plainte met fin aux
poursuites.
b. La propriété de la chose volée
L'article 505 du code pénal dans la définition du vol a
précisé qu'il s'agit d'une chose appartenant à autrui. Le vol de sa propre
chose n'est pas punissable car il s'agit d'un délit impossible. Il peut
paraître facile à première vue de savoir à qui appartient la chose volée. Or,
en pratique c'est souvent extrêmement difficile, d'où deux séries de problèmes
: la notion d'appartenance à autrui et la preuve d'appartenance à autrui.
1. La notion d'appartenance de la chose à autrui
Le vol implique une soustraction portant sur une chose
appartenant à autrui, Cette appartenance de la chose à autrui est une condition
nécessaire et suffisante de l'infraction.
Ceci est d'abord une condition nécessaire de l'infraction,
ce qui veut dire que ie fait de soustraire une chose dont on a transféré la
détention mais dont en a gardé la propriété n'est pas un vol. En effet,
soustraire sa propre chose n'est pas commettre un vol, même si elle se trouve
aux mains d'autrui comme le cas de l'entrepreneur qui reprend du matériel payé
par lui dans une maison inachevée.
Le fait que la chose soustraite doit appartenir à autrui est
aussi une condition suffisante, en ce sens qu'il n'est pas nécessaire de
connaître le véritable propriétaire. Il suffit d'établir que l'auteur de la
soustraction n'est pas le propriétaire de la chose, peu importe que le
véritable propriétaire ne soit pas connu ou ne soit pas désigné dans la
condamnation.
Cette condition d'appartenance de la chose à autrui soulève
quelques difficultés d'application qui sont relatives à l'identité du
propriétaire et à des questions tenant à l'absence du propriétaire :
L'identité du propriétaire : Le problème est le suivant :
qui du voleur ou du volé est le vrai propriétaire de la chose ? Ce problème se
pose lorsque la propriété a été transférée entre deux personnes lesquelles sont
la victime du vol et le voleur.
La question est de savoirs
si au moment du vol le transfert de la propriété a été réalisé ?
Pour répondre à cette question on peut dire que d'une part,
il y a vol dès que l'auteur de la soustraction n'est plus le propriétaire de la
chose volée, d'autre part, il n'y a pas vol si
malgré les apparences, l'auteur de la soustraction est resté propriétaire.
Il y a vol dès que l'auteur de la soustraction n'est plus
propriétaire de la chose soustraite comme c'est le cas de la vente, du prêt
d'argent et de la copropriété.
En ce qui concerne la vente, qu'en est-il du vendeur qui
reprend ou soustrait la chose vendue en cas de non paiement ? Juridiquement, le
transfert de la propriété s'opère instantanément par le seul échange du
consentement. La vente entraîne donc le transfert de propriété. Seulement ce
qui n'est pas évident c'est de savoir si le transfert a eu lieu le jour de
l'achat ou à l’échéance. Si on estime que le transfert a eu lieu au moment de
l'achat, le vendeur commet un vol, si au contraire le transfert n'a lieu que
jusqu'au paiement de la dernière échéance, on considère qu'il n'y a pas vol.
Donc l'existence de l’information va dépendre du problème de la date du
transfert de la propriété.
Si les parties ne prévoient rien, le principe est que le
transfert de propriété s'opère dès la conclusion du contrat, donc toute
soustraction postérieure au contrat est constitutive de vol, Mais ce principe
supporte des exceptions, il y a des cas où le transfert de propriété est
retardé notamment lorsqu'une clause du contrat le prévoit.
La question se pose également pour le prêteur d'argent qui
n'est pas remboursé et qui va soustraire chez l'emprunteur une somme équivalente.
En agissant ainsi, le prêteur d'argent commet-il un vol ? La réponse est
affirmative car lé prêteur est créancier d'une somme d'argent mais non pas
propriétaire des billets.
En troisième lieu, on considère qu'il y a vol lorsque
l'auteur de la soustraction n'est propriétaire que pour une partie de la chose.
Il arrive en effet que l'auteur de la soustraction et la victime du vol
disposent tous les deux d'un droit réel sur la chose. C'est le cas notamment de
la copropriété. A ce propos, l'article 523 du code pénal punit le cohéritier
qui frauduleusement dispose avant le partage, de tout ou partie de l'hérédité.
D'autre part, il n'y a pas vol si l'auteur de la
soustraction est resté propriétaire. Le propriétaire ne peut pas voler sa
propre chose. Donc si quelqu'un soustrait sa propre chose croyant qu'elle
appartient à un tiers, il ne commet aucun vol malgré l'intention coupable qui
l'anime. C'est le cas également du prêteur de corps certains, c'est-à-dire
lorsque le propriétaire s'empare d'un objet qu'il a remis à un tiers à titre
précaire, à titre de gage par exemple. Ces faits ne sont pas constitutifs de
vol mais simplement de détournement qu'il commet sur les choses qu'il a remis à
titre de gage.
L'absence de propriété : Pour les choses sans maître, nous
constatons en premier lieu, les choses qui par nature ne sont pas susceptibles
de faire l'objet d'un droit de propriété comme les choses communes à savoir
l'air et l'eau et dans un deuxième temps, les choses qui sont susceptibles
d'appartenir à quelqu'un mais qui en fait n'appartiennent à personne, tel que
le gibier ou le poisson, sous réserve de ne pas commettre de délit de chasse ou
de pêche et de ne pas les appréhender dans des élevages aménagés.
En troisième lieu, la même solution s'applique au ramassage
des choses abandonnées par leur propriétaire dans les poubelles ou les
décharges publiques.
L'abandon marque le renoncement du propriétaire à son droit
sur la chose. Tout le problème est de savoir quand le propriétaire a renoncé à
son droit. En effet, il faut être sûr que la chose a été abandonnée et non
perdue. Le propriétaire n'entend pas renoncer à son droit sur la chose perdue
et celui qui s'en empare et la conserve commet une soustraction. La distinction
n'est pas facile à établir et les prévenus essaient toujours de soutenir qu'ils
ont cru appréhender une chose abandonnée.
C'est une question d'intention difficile à trouver, et pour
cela le juge s'attache à l'aspect de la chose. En effet, les tribunaux adoptent
un critère assez simple à partir des indices matériels : une chose usagée
détériorée ou de peu de valeur et considérée comme abandonnée alors qu'il faut
présumer la perte des choses neuves ou de grande valeur. D'autre part, qu'en
est-il du problème des trésors ?
Le trésor se définit comme une chose cachée, découverte par
hasard et sur laquelle personne ne peut justifier sa propriété.
L'article 528 prévoit cette hypothèse et la sanctionne en
précisant que « quiconque ayant trouvé un trésor même sur sa propriété,
s'abstient d'en aviser l'autorisé publique dans la quinzaine de la découverte
est puni... ». Le même article ajoute en sanctionnant tout inventeur qui, ayant
ou non avisé l'autorité publique s'approprie le trésor en tout ou en partie
sans avoir été envoyé en possession par le magistrat compétent.
A coté des trésors, existe également le problème des épaves,
ce sont les choses perdues et retrouvées par un tiers. Les épaves terrestres
voient leur régime juridique organisé par l'article 527 qui réprime quiconque,
ayant fortuitement trouvé une chose mobilière, se l'approprie sans en avertir
l'autorité locale ou de police ou le propriétaire ; est punit également de la
même peine quiconque s'approprie frauduleusement une chose mobilière parvenue
en sa possession par erreur ou par hasard.
Quant aux épaves maritimes, le problème est plus important
car les intérêts en jeu sont considérables et c'est le dahir 1916 qui
réglemente cette matière. Ce dahir considère comme épave maritime les objets
flottants ou tirés du fond de la mer ou échoués sur le rivage. Celui qui trouve
la chose doit la déposer au port le plus proche. L'Etat devient propriétaire
après un délai de trois mois et l'inventeur a droit à un tiers de la valeur des
objets trouvés. Si le propriétaire se présente dans le délai de trois mois, on
lui restituera la chose s'il arrive à prouver qu'il en est propriétaire.
2. La preuve
d'appartenance à autrui
L'article 505 exige l'appartenance de la chose à autrui, il
faudra donc prouver que la chose appartient à autrui. L'exigence de la preuve
est parfaitement normale, seulement ce qui fait difficulté c'est que le
problème de la propriété est un problème de droit civil, or précisément le
procès a lieu devant la juridiction pénale. Dès lors il va y avoir des
interférences entre les règles civiles et les règles pénales. Cette
interférence ce constate à deux niveaux :
D'abord lorsqu'il faut déterminer qui a compétence de
trancher le problème, et ensuite pour savoir selon quelle règle va-t-on
trancher le problème de propriété.
Qui a compétence pour trancher le problème de propriété ?
En principe, c'est le ministère public qui doit prouver que
la chose soustraite appartient à autrui. C'est alors que le ministère public
propose des éléments de preuve qui établissent que la chose n'appartient pas à
l'inculpé. L'inculpé va répondre lorsque c'est possible en soulevant
l'exception de propriété, c'est-à-dire que l'inculpé va se défendre en
affirmant que la chose lui appartient. C'est un argument soulevé par l'un des
plaideurs dont l'objet est de paralyser l'examen de fond de l'affaire.
Cependant le problème se pose lorsque l'inculpé soulève l'exception de
propriété. La juridiction pénale peut elle statuer sur le bien fondé de cette
exception ?
Dans ce cas, deux solutions sont possibles, ou bien le juge
pénal tranche lui-même le problème de propriété ou bien il renvoie l'affaire
devant le juge civil. La solution dépend du point de savoir si l'exception
porte sur la propriété d'un meuble ou immeuble.
Lorsque l’exception porte sur la propriété d'un bien meuble,
le juge pénal peut statuer sur la question de propriété en vertu du principe de
procédure selon lequel le juge de l'action est juge d'exception. Si en
revanche, l'exception porte sur la propriété d'un immeuble, le juge pénal n'est
pas compétent, il devra renvoyer l'affaire devant un juge civil. Le juge civil
tranchera le problème de propriété et l'affaire reviendra devant le juge pénal
qui tranchera le problème du vol compte tenu du problème de la propriété.
Selon quelle règle le juge compétent va t-il trancher le
problème de la propriété ? Va-t-il appliquer les règles de droit civil ou de
droit pénal ?
Un point est certain, lorsque la juridiction civile est
amenée à statuer elle ne peut statuer qu'en utilisant les règles civiles,
notamment les règles civiles que la loi a prévues pour la propriété
immobilière. Donc le juge compétent en matière d'immeubles ne peut utiliser
d'autres modes de preuve que les preuves civiles sous prétexte que le problème
de propriété conditionne l'existence de l'infraction.
En revanche, il y a problème lorsque c'est le juge pénal qui
statue, doit-i! se conformer aux règles civiles sur la preuve ou au contraire
peut il prouver la propriété par n'importe quel moyen ? En principe, iejuge
pénal doit suivre les règles civiles. Il n'y a qu'un cas où le juge pénal
pourra prouver partout moyen en cas de perte ou vol du titre de propriété
lui-même.
La soustraction exigée par l'article 505 du code pénal est
l'élément le plus visible et le plus caractéristique du vol. Soustraire c'est
prendre, enlever, ravir, c'est faire passer un objet de la main de son
détenteur légitime, contre son gré, entre les mains de l'auteur du délit.
La soustraction consiste donc à prendre et à emporter une
chose à l'insu ou contre le gré de son propriétaire ou possesseur, c'est-à-dire
à en usurper la possession de façon complète et définitive.
Pour qu'il y ait soustraction, il faut qu'il y ait
enlèvement de la chose au sens matériel, mais cette conception assez stricte a
été élargie par la jurisprudence, qui estime que la soustraction par
déplacement matériel peut s'entendre également de l'usurpation, même
temporaire, de la simple détention matérielle d'une chose et qu'ainsi commet
une soustraction celui qui se contente de détenir des documents le temps
nécessaire à leur reproduction. Disons d'une façon générale que l'acte matériel
d'enlèvement a de moins en moins d'importance vu qu'il existe aujourd'hui des
techniques nouvelles qui permettent de substituer les choses sans qu'il y ait
enlèvement matériel.
La jurisprudence adopte une définition plus simple de la
soustraction, on trouve souvent dans les arrêts la définition suivante : « La
soustraction est tout acte positif qui a pour résultat de conférer à son auteur
une maîtrise de fait sur la chose ». On ne parle plus ni de main prise ni de
violence et par conséquent, aujourd'hui, la soustraction peut exister même si
elle est obtenue par des moyens indirects. D'une manière générale, on admet
aujourd'hui qu'il y a soustraction même dans des hypothèses où la chose a été remise
au délinquant.
Paragraphe
2 : L’élément moral du vol
L'article 505 du code pénal parle de soustraction
frauduleuse. Il faut donc qu'il y ait une fraude et c'est précisément
l'intention. Il s'agit pratiquement de l'application des règles générales sur l'intention.
Le vol est donc une infraction intentionnelle, c'est-à-dire que l'intention est
une condition nécessaire et suffisante.
A. L’intention
condition nécessaire de l’infraction
Il faut constater qu'une intention frauduleuse à défaut de
quoi il ne peut y avoir vol, il n'y aura pas vol en cas d'erreur et en cas du
consentement du propriétaire.
II n'y aura pas vol en cas de soustraction faite par erreur
lorsque l’agent ignorait que la chose appartient à autrui par contre l'erreur
de droit n'est pas admise, on ne saurait admettre que les particuliers puissent
se faire justice eux même en s'emparant de biens appartenant à autrui, au lieu
d'utiliser les voies de droit qui la loi met à leur disposition.
Il n'y a pas de vol en cas du consentement du propriétaire.
Lorsque le propriétaire a consenti, l'agent ne peut être poursuivi pour vol.
L'existence du consentement est une question de fait, il peut parfois être
tacite.
B. L’intention est
une condition suffisante :
Il suffit de l'intention pour que le vol soit constitué
indépendamment de tout autre élément, ce qui veut dire que l'intention
frauduleuse ne se confond pas avec le mobile qui n'exerce aucune influence sur
l'élément moral de l'infraction (exemple : Commettent un vol ceux qui
s'emparent sciemment de choses appartenant à autrui que ce soit par jeu, par
vengeance ou cupidité ou pour détruire des publications jugées scandaleuses).
De même, le désir d'appropriation n'est pas exigé (exemple :
faire envoler les oiseaux du voisin).
Section 3 : La répression du vol
Le code pénal marocain prévoit trois catégories de vol, à
savoir : le délit de police, le délit correctionnel; le vol qualifié de crime.
Pour ce dernier, sa gravité dépend de l'existence d'une ou plusieurs
circonstances aggravantes qui sont prévues dans les articles 508, 509, 520
comme les circonstances de temps (la nuit), de lieu (chemin public) ; selon les
modes d'exécution (port d'arme, violence ou effraction) ou la qualité de
l'auteur (vol par domestique, aubergiste ou serrurier).
Cependant, quelque soit la qualification du vol, la
tentative est assimilable à l'acte consommé et est punissable comme tel. De
même lorsque le vol est un délit, il entraîne, en plus de la peine maximale,
une peine accessoire facultative d'interdiction d'un ou plusieurs droits
civiques, civiles ou de famille prévue à l'article 40 du code pénal, en plus de
l'interdiction de séjour pour cinq ans au moins et dix ans au plus.
Les articles 534 et 535 prévoient les immunités légales qui
s'appliquent au vol (exemple : vol entre conjoints).